Facteur pour femmes

« Aucune île n’est à l’abri des continents imbéciles »

Qu’est-ce que cette BD m’était insupportable ! Une sacrée déception au final et j’en suis vraiment navrée…

Facteur pour femmes
De : Didier Quella-Guyot et Sebastien Morice
Chez : Grand Angle

Résumé :
La Première Guerre mondiale vide une petite île bretonne de ses hommes.
Il ne reste plus que les enfants, les vieux et les femmes… Et Maël.
Malgré ses envies de défendre la patrie, il n’est pas mobilisé, car il a un pied-bot. Il devient le seul homme, jeune et vigoureux, de l’île… À sa façon, il participe à l’effort de guerre en distribuant le courrier aux habitants, des femmes essentiellement…
Celui que toutes ignoraient découvre ainsi tous leurs secrets…

En quelques mots : manipulation, solitude et tromperie

De quoi ça cause :
Une petite île de Bretagne se voit atteinte par la guerre. Les jeunes hommes partent en pensant rentrer très vite. Sauf Maël qui a une malformation du pied mais qui va prendre le rôle de facteur, puisqu’il sait lire.
Cette activité lui plait et il met un point d’honneur à servir les femmes éloignées de la ville. Pour lui, il est hors de question de leur apporter un courrier triste et désespérant. Alors il va lire les courriers, puis les modifier pour qu’ils plaisent à leurs destinataires… Et bientôt il s’imposera le rôle de réconforter ses femmes seules.

Et ce que j’en pense : (je m’excuse d’avance pour tant de colère)
On ne va pas y aller par quatre chemins, cette BD ne peut pas entrer dans mes bonnes lectures. Le dessin à beau être splendide, épuré, avec des personnages magnifiques, il ne compensera pas le ton problématique de la BD

Un personnage qui pose problème : les malheurs de Maël
Les auteurs nous ont présenté ce personnage pour qu’il attire notre sympathie. « Le pauvre » se dit-on au début. Dans les premières pages on sent qu’il a été méprisé pour sa malformation, qu’il devait être moqué à l’école et cible de toutes les railleries. Les villageois – quel âge ont-ils ? – lui envoi des piques acérés qui sont loin d’être inhabituels au vu de la réaction de Maël. Alors tous les hommes (en âge) partent à la guerre sauf lui. On peut comprendre un certain ressentiment, et les allusions des collègues n’aident pas.

« Messieurs ! Pour la patrie, que vous soyez pêcheurs ou paysans, vous devenez tous des soldats… pour une France qui, d’ordinaire, oublie ses « Finis Terrae ». »

En plus de supporter ça, on apprend aussi qu’il est détesté par son propre père. Un père acariâtre, violent, dictatorial et qui se dit en guerre avec son fils. Et Maël est toujours montré comme le « pauvre petit gars qui a rien demandé ». Il va même repeindre l’église… Comment peut-on penser qu’il sera un personnage immonde à ce stade là ?

Et on se dit : « ah ! j’espère que grâce à sa nouvelle activité il saura trouver sa place ! ». Et c’est là tout le problème.

Une psychologie qui pose problème : un dangereux manipulateur
Très vite il va se transformer en un manipulateur pervers (je ne suis pas psychologue, les termes sont de l’ordre du ressenti). Il épiera les conversations des femmes, rien de grave donc, mais immédiatement après il va se mettre à lire les courriers. Cette action va être montrée avec toute la gentillesse du type puisqu’il cherche alors à leur éviter des mauvaises journées (et donc éviter de leur transmettre les mauvaises nouvelles). Et comment leur éviter de passer des sales journées lorsqu’on est un facteur égocentrique, manipulateur avec un fort besoin de dominer ? En lisant les lettres le soir, et « celles qui sont trop triste, tant pis, je les garderai ! ». Le bonhomme est loin d’être idiot, c’est pourquoi ses victimes seront choisies et essayées avec soin. Des femmes qui ne sont pas de la ville puisqu’elles sont commères, sans enfants pour ne pas créer de zizanies.

Toutes les actions qu’il fera seront « pardonnées » car compréhensible. Il lit les courriers pour mieux réconforter les destinataires. Il va commencer à leur faire l’amour (après leur avoir menti, avoir fait mentir leur mari via les courriers…) parce qu’elles le veulent et pour les réconforter. Il modifie les courriers pour… pour aucune autre raison que lui-même ! Pourquoi transformerait-il « je t’en supplie, ne me quitte pas » en un mauvais « je comprendrais que tu trouves un autre homme ». Et idem lorsqu’il écrit sous la dictée des femmes en transformant « mon chéri, tu me manques terriblement… » en un piteux « mon ami, tu me manques un peu ».
Si ces actions – mensonges, manipulation, tromperie, voir la femme comme un trophée… – ne vous débectent pas, alors retenez qu’il a assassiné son père. Certes, un homme violent et imbuvable, mais il l’a tué quand même. Il a pris la tête de son père et a frappé le sol à trois reprise avec, pour lui exploser le crâne.

Finalement une BD que je ne supporte pas
Tout ce qui fait le personnage de Maël me met en rage. Cette manipulation qui se veut être innocente, ce soi-disant besoin de Maël de réconforter les femmes, tout ça est toxique.
Alors oui, il est bon de montrer des femmes qui ont envie et besoin de faire l’amour. J’aime aussi le fait de montrer qu’elles n’avaient pas ou peu d’amour pour leur mari (pour certaines) puisqu’on leur a fait faire des mariages forcés. Malgré tout, les femmes passent pour des idiotes. Comment expliquer qu’elles ne se doutent jamais que Maël ait couché avec les autres ? Pourquoi ont-elles toutes besoin de faire l’amour après quelques semaines d’absence de leur mari ?

J’aurais pu aimer cette BD puisque les femmes ont poussé Maël vers la mort. Pourtant je ne peut tolérer que l’histoire se clôture sur l’inauguration d’un restaurant appelé « la Crêperie du facteur » par la fille du facteur et une des femmes de l’île. La fille sait pourtant l’histoire. On lui a raconté qu’il avait manipulé les femmes, manipuler les dires de leurs maris…
Je n’accepte pas de rendre hommage, avec un restaurant ou une statue ou un simple tableau (dans ledit restaurant), à une telle personne… C’est prôner le mensonge et la manipulation.

Citations qui me posent problèmes (dans leur contexte) :
« enfin, pour avoir la paix, il n’a quasiment pas touché aux filles du villages : c’est commères et compagnies, la guerre assurée ! »
« si c’est le cas, elles vont passer de sales journées. Comment leur éviter ça ? Je les lirai ce soir ! Celles qui sont trop tristes, tant pis, je les garderai ! »
« Il vient de comprendre que certaines de ces femmes sont terriblement seules et inquiètes et n’attendent que lui. »
« Alors il comprend que les mauvaises nouvelles peuvent en libérer certaines et lui offrir de nouveaux coeurs à séduire, sinon à conquérir »
« je serai facteur pour femmes, tiens, toute ma vie ! Rien que pour leurs beaux yeux et leurs beaux tétons ! »
« Alors, qui est le maître à présent ? Hein ? Qui est le maître ? Le maître des femmes ? C’est moi, c’est moi, c’est moi ! Ha ! ha ! ha ! »

Publié par Finn Thilliamon

Je suis une larmoyante. Je pleure quand c'est triste, quand c'est beau, émouvant, drôle, mignon, quand c'est fini, quand c'est excitant, devant de belles romances et amitiés devant ce qui a la classe et ce qui coupe le souffle. Et je chante aussi, mal, mais je chante !

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